Il me semble important de commencer par rappeler que les héros face à cette crise sont tous les acteurs de première ligne (soignants, caissières, livreurs,…), mais aussi toutes les personnes qui restent chez elles malgré toutes les difficultés que cela peut engendrer.

Référent des matières « Santé ».

Au sein du groupe Ecolo au Parlement Wallon, je suis le référent des matières « Santé ». Depuis le début de la crise, mon rôle a été de suivre l’actualité et de tenir informer mes collègues de la situation sanitaire.

A la mi-janvier, au fur et à mesure des jours et des informations venant de Chine, les craintes commençaient à se confirmer…  Nous étions face à une nouvelle épidémie dont nous ne connaissions pas encore l’ampleur.

Mise en place du Risk Managerment Group.

Ce groupe composé d’experts et des différents référents santé des cabinets ministériels a été mis en place dès la fin du mois de janvier.

L’objectif était de pouvoir avoir un maximum d’informations scientifiques sur le virus et en même temps de pouvoir gérer les personnes revenants des zones infectées en Chine.

Mise en place des mesures.

Durant le début du mois de février

La situation était gérée de manière simple, les personnes revenants de Chine étaient contrôlées.  Le premier cas en Belgique est arrivé le 3 février, il a été pris en charge par l’hôpital de référence St Pierre de Bruxelles.

Au fur et à mesure que les données scientifiques arrivaient de Chine, on pouvait constater certaines particularités assez inquiétantes de ce virus :

    • Le temps de contamination (on pouvait avoir le virus plusieurs jours sans avoir de symptômes)
    • Le nombre de complication respiratoire due au virus.

Mais jusqu’au 20 février, la situation en Europe était « sous contrôle », les cas étaient vite détectés et mis en quarantaine.

Début de la crise italienne

A partir du 20 février, l ‘Italie n’arrivait plus à contrôler l’épidémie, les premiers décès sont déclarés.  L’épidémie s’étend à la France, l’Espagne, l’Allemagne.  La Belgique est encore épargnée.

Ce n’est qu’une grosse grippe, pas d’inquiétude !

En Belgique, les vacances de Carnaval battent leur plein et on a l’impression que c’est aussi la cas au niveau politique.  Mais les médias commencent à s’emballer, il y a des informations contradictoires qui commencent à circuler dans tous les sens.  Les médecins généralistes ne connaissent pas les procédures, aucune décision n’est prise.  Il y a un manque d’informations.

Ma collègue Laurence Hennuy (députée Ecolo au fédéral) essaye d’alerter, mais les vacances ont mis le gouvernement fédéral en sourdine.

https://www.rtl.be/belrtl/video/737950.aspx

A la fin des vacances scolaires, de nombreuses inquiétudes commencent à émerger car de nombreux pays voisins sont touchés.

Les écoles ou les entreprises ne savent pas comment réagir.  Annuler les classes de neige ?, mettre en quarantaine les personnes revenants des zones infectées ?

Le premier cas revenant d’Italie se déclare, les ministres fédéraux se rassemblent le dimanche 1 mars pour faire le point et prévoient une réunion le mercredi avec les autres entités fédérées.

Le retour des vacances se fera sans décision, il faudra attendre.

Une semaine sans décision

Cette première semaine du retour des vacances est la semaine des décisions qui vont dans tous les sens.  Tout le monde est encore divisé.  Certains voudraient qu’on prenne déjà des mesures, d’autres crient qu’il ne faut pas céder à la panique.

D’ailleurs, le mercredi, la réunion du comité de concertation entre les gouvernements régionaux et celui du fédéral ne débouche sur aucune nouvelle mesure pour faire face au coronavirus, mais les différents ministres souligneront l’importance de « ne pas céder à la panique ».  Les laboratoires et les hôpitaux restent mobilisés et il est inutile de faire appel à son médecin en l’absence de symptômes.

 » Nous sommes loin de fermer les écoles  » a indiqué le ministre-président de la Fédération Wallonie-Bruxelles Pierre-Yves Jeholet (MR). « La situation est loin d’être comparable à la France. Cela n’a pas de sens, aujourd’hui, d’en fermer. Il faut avoir des mesures proportionnées. »

Le mercredi de cette semaine, nous sommes en séance plénière au Parlement de la fédération Wallonie-Bruxelles.  Lors des questions d’actualité, nous pouvions interroger le gouvernement.  Tous les secteurs de la Fédération avaient des questions qui ne trouvaient toujours pas de réponses.  Ils ne trouveront pas de réponses dans le chef du ministre-président de la Fédération.  On sentait tout le monde naviguer vers l’inconnu.

Les premières mesures du gouvernement Fédéral.

Il faudra attendre le lundi suivant pour avoir les premières mesures du gouvernement Fédéral et la mise en place du comité national de sécurité qui va déclarer la Belgique en phase 2 renforcée.

    • Il y aura l’interdiction des rassemblements de plus de 1000 personnes.
    • Les médecins ne verront plus leurs patients, mais toutes les consultations se feront par téléphone pour éviter les contaminations.

La Belgique est encore épargnée par rapport à ses pays voisins. En Espagne, en France et surtout en Italie, le nombre de cas augmente en flèche.  Les gouvernements commencent à prendre des décisions de fermeture.  Voir les autres pays prendre des mesures et pas la Belgique rend la situation tendue,  on sent monter la grogne !

Le mercredi 11 mars,  en séance plénière au Parlement Wallon, le débat d’actualité se concentre sur les questions liées au coronavirus. Les experts nous expliquent que si la Belgique doit prendre des mesures supplémentaires, il faut les expliquer aux citoyens pour qu’ils comprennent leur importance.

Si la Belgique prend des mesures, la priorité est de penser aux  personnes qui seront impactées et en difficultés face à ces mesures.

 

La Belgique rentre dans un monde inconnu… celui du confinement

Le jeudi 12 mars, la Belgique décide de fermer toutes les écoles ainsi que tous les restaurants et bars.  Nous basculons vers un nouveau monde que nous ne connaissons pas « le confinement ».

Après une soirée de jeudi devant la télé comme tous les belges, le vendredi s’annonce chargé. En effet, les nombreux coups de téléphone amènent leur lot de questions.

Comment la Belgique va-t-elle gérer cela ?  Tout le monde est sur la brèche pour implémenter les décisions de la veille.

Tous les jours suivants commencent à se ressembler, répondre au téléphone ou par mail aux citoyens et acteurs de terrain qui cherchent des solutions pour adapter leur vie.

Les pouvoirs spéciaux au gouvernement

La question de l’adaptation du travail parlementaire aux règles de distanciation se pose.  La solution sera de donner des pouvoirs spéciaux au gouvernement car il sera difficile de rassembler le Parlement pendant cette période de crise.

 Situation inédite. 

Les parlementaires se rassembleront une dernière fois physiquement , le mardi 17 mars , pour donner les clés de la Wallonie au Gouvernement.

C’est devant un Parlement vide qu’il faut prendre la parole.  C’est une situation inédite car c’est en temps de guerre que ce genre de mesure est prise.  D’ailleurs, la veille, Emmanuel Macron (Président français) fait une déclaration à la télévision où le mot guerre sera répété plus de 8 fois.  Le Ministre-Président Wallon utilisera aussi ces mêmes mots.

Mais nous ne sommes pas en guerre, nous sommes face à une crise, une catastrophe. Notre réponse devra être celle de la solidarité, pas de la violence.  C’est aussi une dernière fois l’occasion de demander à ne pas oublier les personnes les plus fragiles.

Le soir même, le conseil national de sécurité décidait de durcir les mesures.  Le confinement devient quasi total.

La Première Ministre prendra la parole, son ton ne sera pas le même que celui du Président français de la veille.  Nous ne pouvons que soutenir cette attitude plus emphatique face à la situation.  « Prenez soin de vous, prenez soin des autres ».

En mode télé travail

Depuis ce moment, nous découvrons le travail parlementaire en mode télétravail. C’est une situation inédite car on a l’habitude de sauter de réunion en réunion.  Aujourd’hui, on saute de réunion virtuelle en réunion virtuelle.

Comme tous les citoyens, nous découvrons de nouvelles manières de travailler, mais aussi de nouvelles manières de vivre.

Le 26 mars, le Parlement a décidé d’organiser sa première séance virtuelle afin que les parlementaires puissent continuer leur travail de contrôle du gouvernement.  C’est une première en Belgique.

Le résultat fût probant puisque qu’il y a eu plus de 7 heures de questions aux différents ministres afin qu’ils puissent expliquer les différentes mesures prises.

A ce jour, nous ne savons toujours pas comment nous allons sortir de la crise. 

Par contre, ce qui est certain c’est que nous ne voulons plus retourner à notre ancien monde. Nous ne voulons plus d’une économie incapable de produire les produits de protection essentiels pour les soignants.  Nous ne voulons plus vivre dans un monde où des gens ne peuvent pas rester chez eux car ils n’ont pas de chez eux. Nous ne voulons plus d’un monde qui n’est pas capable de prendre soin des siens. Nous voulons un monde résilient, une économie résiliente.  Nous voulons un monde où l’économie prend soin des siens et pas d’une économie qui utilise les gens. 

Ce monde nous l’espérons, nous le rêvons depuis des décennies, il faudra maintenant le rendre réel.